Knowledge is a deadly friend when no one sets the rules. The fate of all mankind I see is in the hands of fools. King Crimson - Epitaph (1969)

L'ombre d'un doute

Écrit par Paul Renard. Publié dans Humeurs du moment

Excellente émission sur France 3 hier soir (cliquez ici pour revoir l'émission durant les jours qui viennent). On y a abordé LE sujet tabou des livres d'Histoire : les massacres perpétrés en Vendée par l'armée républicaine durant la Révolution Française. Les faits sont accablants : alors qu'en 1793, la Révolution bascule dans la Terreur, l'Ouest de la France, catholique et royaliste de tradition s'insurge contre Paris. Le Comité de Salut Public, alors aux mains de Robespierre décide de frapper un grand coup.

Petit résumé. Durant des mois, les généraux de l'armée républicaine vont se livrer à un massacre de masse : hommes, femmes, enfants, vieillards, seront massacrés et jetés dans des charniers. Au Mans, 9 charniers sont découverts place des Jacobins en 2009. Les archives de l'époque font état de 15000 cadavres. Et sur les 159 squelettes exhumés, 30% sont féminins. Il ne s'agissait donc pas de combattants… Ce massacre du 13 décembre 1793 préfigure les suivants.

En 1985, un jeune historien, Reynald Secher, publie une thèse où il parle clairement de génocide. On célèbre alors les 200 ans de la Révolution : tollé général de la part des instances et des historiens !

Il faut comprendre qu'après l'exécution de Louis XVI, la France se retrouve en guerre contre toute l'Europe. La Révolution doit vaincre ou mourir. Une armée de 300 000 hommes est donc levée pour combattre. Mais les paysans s'insurgent, et notamment… en Vendée, sur une zone incluant la Loire Atlantique, les Deux-Sèvres, le Maine et Loire et… la Vendée. Ces populations, au départ plutôt favorable à la Révolution finissent par se raidir face aux mesures prises par le pouvoir révolutionnaire, par exemple le doublement de l'impôt, le service militaire obligatoire, ou encore le serment obligatoire des prêtres. Le rassemblement des hommes pour la conscription est l'occasion pour les mécontents de se réunir et s'organiser. Des villes sont prises (Cholet entre autres). À Machecoul, c'est l'escalade de la violence : le curé "constitutionnel" est torturé à mort, les notables connus pour leurs sympathies républicaines sont massacrés. La France apprend alors qu'il existe une zone où l'on tue des patriotes. Alors que la Convention est encore majoritairement aux mains des Girondins modérés, les Montagnards, emmenés par Robespierre et Barère, vont en profiter pour prendre le pouvoir et organiser une répression totale de l'insurrection : le Comité de Salut Public est créé le 6 avril 1793. En Vendée, ce sont les aristocrates qui se chargent d'organiser l'armée des "blancs". Les villes tombent les unes après les autres : Fontenay, Saumur, Angers,… Fin mai, ils contrôlent toute la rive droite de la Loire. Robespierre décide d'employer les grands moyens : tant que la République est menacée, toutes les mesures sont bonnes ! Femmes, enfants et vieillards seront déportés, le reste sera anéanti. À cet effet, Carnot dépêche en Vendée l'armée de Mayence : 16 000 soldats bien armés et disciplinés. La suite est connue : au total, ce seront 170 000 Vendéens qui seront sauvagement trucidés par les "bleus" (l'armée républicaine ainsi nommée en raison de l'uniforme bleu que les soldats portaient).

Si je vous parle de cela, c'est pour rappeler que cet épisode barbare a tout de même eu lieu quelques mois à peine après la fameuse déclaration des Droits de l'Homme. Et qu'en moins d'une décennie, la Révolution Française a ouvert une voie impériale (sans jeu de mots) à un petit dictateur ventripotent qui a mis l'Europe à feu et à sang durant 15 ans. Comme quoi, il est parfois utile de balayer devant sa porte.