Crise, croissance et dividendes
"La part de valeur ajoutée accordée aux salariés en location de leur temps de travail doit leur permettre de consacrer la majorité de leur revenu à acheter les produits qu'ils fabriquent". Tout le monde connaît ce principe fordien sur lequel est fondé le système capitaliste. Tant que ce principe est respecté, tout va bien : l'équilibre est préservé et les actionnaires perçoivent les dividendes de leur investissement dans les entreprises. Des dividendes qui suivent normalement la courbe de la croissance. Par exemple : + 3 % de croissance = + 3 % en terme de dividendes. Sauf que… depuis 1993, la croissance évolue normalement, tandis que les dividendes explosent car les actionnaires en veulent toujours plus. Résultat : les entreprises sont forcées de devenir de plus en plus rentables. Et bien évidemment, la variable d'ajustement, c'est la masse salariale ! Mais ce n'est pas tout : depuis 2003, la part de dividendes distribués sur les bénéfices réalisés dépasse largement celle de l'investissement. Ce qui signifie en clair que les entreprises vieillissent et deviennent moins compétitives, tandis que les actionnaires réclament de plus en plus d'argent. Ce qui signifie également que ces actionnaires sont de plus volatiles, ne conservant leurs actions que le temps d'engranger des bénéfices conséquents (un portefeuille d'actions ne dure plus en moyenne que 2 ans). Il ne s'agit donc pas d'un problème de compétitivité des entreprises, mais d'un problème de finance : une économie ne peut pas tenir de façon pérenne dans ces conditions. D'autant que cet égoïsme entraîne évidemment une augmentation des charges : plus il y a de chômage, plus le coût est élevé, tant pour le salarié que pour l'entreprise, alors que le pouvoir d'achat ne fait que se casser la figure. En fait, nous sommes revenus à la situation des années 1925 où 1% de la population détenait 20 % des richesses et ne songeait qu'à continuer à s'engraisser. Tout placement où l'on vous propose un rendement de 10 % ou plus annuel alors que la croissance stagne est forcément délétère. Si rien n'est fait, nous courons à une catastrophe non seulement économique, mais surtout humaine ! Il faut se souvenir des conséquences de cette situation dans les années 1930, avec la montée des idées fascistes, du racisme, et l'ascension des partis extrémistes. Il est tellement plus simple de trouver des boucs émissaires que de régler les vrais problèmes…