Knowledge is a deadly friend when no one sets the rules. The fate of all mankind I see is in the hands of fools. King Crimson - Epitaph (1969)

L'intolérance

Écrit par Paul Renard. Publié dans Humeurs du moment

On m'a récemment taxé d'intolérance, alors que je commentais les propos du pape dans lesquels il critiquait ouvertement les caricatures ou le fait de tourner la religion en dérision. Je rétorquai en effet que ce monsieur ferait mieux de se souvenir des milliers de torturés et brûlés sous l'inquisition, des génocides de civilisations multimillénaires (Maya, Aztèques, Incas, et j'en passe), et, plus récemment, des curés bénissant les bombes que Franco balançait sur la gueule des Espagnols, ou de l'un de ses prédécesseurs (Pie quelque chose) qui considérait Mussolini comme un homme providentiel. Je concluais en disant : "alors, pape François, ferme ta grande gueule, merci !".

 

A tout cela, on me répond qu'on peut aussi, par exemple, reprocher aux communistes les massacres du régime stalinien et que donc, je suis intolérant (moi, intolérant...).

Mauvais exemple : comment d'une part effacer de l'Histoire du monde les méfaits des religions (croisades, tortures, massacres, collusions avec les dictatures en place au fil des siècles), et en même temps pointer du doigt Staline ? Malgré ce sinistre individu, l'idée de base de Marx visait bien au bonheur du peuple face au joug de la répression politico-religieuse, visait à l'égalité des hommes et des femmes de la Terre, au partage des richesses de ce monde.

Et cela n'a jamais été le cas d'aucune religion (à part peut-être le bouddhisme, qui n'est d'ailleurs pas une religion, mais une philosophie), lesquelles doivent, au contraire, maintenir les inégalités pour survivre ! En effet, si l'Humanité fraternisait et vivait dans la joie, elles seraient vouées à disparaître immédiatement : plus besoin d'un "au-delà" glorieux autant qu'hypothétique dès lors que l'on vivrait en harmonie ici-bas.

Plus besoin de guides, de gourous, de papes, de popes, d'imams, de rabbins, ou que sais-je encore, dès lors que tout le monde vivrait en paix dans le respect mutuel !

Cela n'a jamais été, et c'est même de moins en moins le cas, puisqu'on voit, par exemple, que 1% de la population mondiale détient aujourd'hui 50 % des richesses de la planète, créant partout la pauvreté. Alors se pointent les "guides spirituels" défendant les pauvres (leur clientèle de base) tout en jouissant des oboles ou des dons de ceux qui croient compenser leur fortune en achetant leur coin de paradis. "C'est pour notre église, ma bonne dame".

Tout est question de croyance : la croyance en l'existence d'un être supérieur ayant créé la Terre, puis les étoiles, et enfin l'être humain. Une croyance comme une autre : dire "dieu n'existe pas" est également une croyance.

Mais il existe une différence fondamentale entre les deux. Lorsqu'on dit "dieu n'existe pas", la question est réglée. Mais lorsqu'on dit :"dieu existe", il faut alors trouver un moyen de le prouver ! Et comme cela est bien entendu totalement impossible, alors on crée le dogme. Dieu existe et il a créé le monde. À partir de là, il faut imposer une foi inébranlable dans le coeur des fidèles. Ce que l'on ne peut pas expliquer est enrobé dans des récits fantasmagoriques, tenant de la Fantasy, du miracle, des "mystères"("les voies du saigneur – la faute est volontaire – sont impénétrables").

Et c'est cette foi qui va permettre de manipuler les populations les plus fragiles et les envoyer se faire flinguer sous la coupe de dictateurs, avec la promesse que "dieu reconnaîtra les siens".

Et les effets pervers des dogmes religieux ne s'arrêtent pas là : un dogme est un dogme, il est intangible, immuable. Normal : c'est la voix d'un dieu, censé être éternel. Une loi humaine se discute. La loi divine non. Cela signifie qu'une société sous la coupe d'une quelconque religion se retrouve coincée dans une "non évolution" permanente, quand il ne s'agit pas carrément d'involution, lorsqu'une religion réemerge brusquement.

Prenons quelques exemples pour illustrer ce propos. Dans l'Histoire tout d'abord, avec la répression par l'église catholique de toute avancée scientifique. Combien ont fini leur vie dans les geôles du vatican après avoir dû se rétracter pour avoir affirmé que la Terre est ronde et qu'elle tourne autour du Soleil (Galilée, Copernic), voire finir sur un bûcher (Giordano Bruno) ? Rappelons au passage, pour être juste, que l'Espagne dominée par les Arabes jusqu'à l'arrivée du sinistre Charles Quint, était un havre de paix pour tous ceux qui étaient pourchassés par l'inquisition, ce qui explique la prolifération de synagogues, de mosquées,... et aussi d'églises, dans ce pays. Du passé, me direz-vous. Eh bien non, lorsqu'on voit émerger les théories délirantes des créationnistes et autres adepte de "l'intelligent design". Des théories que W. Bush voulait remettre au programme des écoles américaines, en parallèle avec Darwin.

Autre exemple : la réaction en France, pays de la Révolution, de la République, des Droits de l'Homme (homme étant pris sous le sens "être humain"), lors du vote sur le mariage pour tous. Une belle loi qu'a défendue Christiane Taubira, que je salue au passage, avec le talent et la culture qu'on lui connaît.

Partout où le dogmatisme religieux sévit, l'immobilisme s'installe.

Et si, de surcroît, viennent s'y mêler des intérêts financiers, industriels et militaires, alors, c'est le chaos qui s'installe.

Depuis des décennies, le Moyen Orient, qui détient toujours les plus grosses réserves de pétrole, fait l'objet de la convoitise et de l'appât du gain. On se souvient de l'Iran où le premier ministre Mohamed Mosadegh, qui voulait faire profiter son peuple de la manne pétrolière, a été destitué suite à une campagne de propagande orchestrée par la CIA (ce que reconnaît aujourd'hui l'administration Obama), pour laisser place au shah de triste mémoire. Jusqu'à ce que sa dictature soit elle-même remplacée par un régime religieux impitoyable : c'est l'oppression et la misère qui provoquent les révolutions. Mais le pétrole pouvait continuer à couler ! De l'Iraq, où l'on a aidé à se maintenir en place Saddam Hussein, lui aussi de triste mémoire, jusqu'à ce qu'il devienne quelque peu encombrant. De l'Afghanistan, où le régime des talibans maintenait la population sous un joug effroyable dans l'indifférence générale, jusqu'à ce qu'ils fassent péter des statues de bouddha. Cet Afghanistan pour lequel on avait formé un tristement célèbre futur terroriste pour taper sur la gueule des Russes. À force de jouer avec le feu, on se brûle les mains...

Qu'en est-il aujourd'hui ? En Syrie, en Iran, en Iraq, en Afghanistan, la soif de l'or a créé un monstre dont on semble découvrir soudain l'émergence. Car, quel est le terreau des intégrismes, du terrorisme, et autres "joyeusetés", sinon la misère des populations que l'on peut alors manipuler en leur promettant le paradis ? Peut-on, un instant croire que des gens vivant confortablement, ayant une vision de l'avenir, des projets pour leurs enfants, iraient en tuer d'autres ou se faire péter la gueule ?

D'ailleurs, il en va de même chez nous : la crise économique, le chômage de masse, les délocalisations, la baisse du pouvoir d'achat, ou encore la corruption massive qui touche nos sociétés dites "développées" ne font qu'attiser les rancoeurs, les haines, le rejet des autres,... et le recours à cet "au-delà" hypothétique. Le retour des fanatismes, qu'ils soient politiques ou religieux. En bref : le retour de l'intolérance (vous voyez que j'ai de la suite dans les idées !).

Allez, un peu d'humour pour conclure :

- Le chrétien dit : les musulmans et les juifs ont tort.

- Le musulman dit : les chrétiens et les juifs ont tort.

- Les juifs disent : les musulmans et les chrétiens ont tort.

- L'athée que je suis dit : vous avez tous raison !