Survivre au progrès
Il y a quelques jours, Arte a diffusé un passionnant documentaire intitulé "Survivre au Progrès". On devrait regarder Arte plus souvent...
Je fais souvent référence ici à des émissions de la chaîne européenne, mais ici, en cette période de "crise" - vous savez : celle dont on nous rebat les oreilles et les yeux à longueur de JT sans bien entendu y apporter la moindre solution, sauf celle d'une croissance illusoire et utopique - l'émission tombe vraiment à pic. Allant comme toujours au fond des choses, on y apprend tout simplement ce qu'on pourrait pourtant deviner si l'on utilisait le kilo de neurones dévolu à chacun (en principe !) : à force de se répandre partout sans discernement, les civilisations passées et présente ne font qu'épuiser toutes les ressources jusqu'à ce qu'on s'aperçoive qu'il est trop tard. Sauf que, dans le cas actuel, bien qu'on prenne conscience de l'urgence,... on continue de plus belle, comme si le problème n'existait pas. J'ai déjà parlé de l'utopie du fameux Développement Durable ; eh bien, nous sommes en plein dedans.
En ce moment, je lis un bouquin de Jacques Sternberg, magnifiquement illustré par Topor, paru aux éditions Denoël en 1988 : "188 contes à régler", et l'un de ces contes illustre parfaitement mon propos. Le voici in extenso (j'espère que l'éditeur ne m'en voudra pas trop !) :
"La genèse
En réalité, Eve découvrit par hasard une pomme, la tendit à Adam qui la croqua et la trouva succulente. Comme le premier homme supportait déjà mal de rester inactif, il planta un autre pommier. Puis beaucoup d'autres, ce qui lui valut d'amples récoltes de pommes et les tendres encouragements de sa compagne. La notion de travail était née, en même temps que celle de persévérance, d'ambition et de volonté d'en imposer à la femme. Plus tard, Adam arriva à extraire le cidre, soit un breuvage euphorisant, capable de lui faire oublier les tracas du quotidien. Ses enfants, ses petits-enfants continuèrent à cultiver de la pomme, mais une partie d'entre eux dévouvrirent les charmes de la vigne et du raisin. Découverte qui engendra la concurrence, puis logiquemet la notion de troc, donc le commerce, le profit, le besoin de posséder. Et comme le vin extrait du raisin enivrait plus agréablement que le cidre, il s'imposa comme la boisson favorite de l'homme devenu très vite l'esclave du labeur. Ainsi devait germer ce qu'on appela, plus tard, un peu à la légère, une civilisation."
Si vous en avez l'occasion, procurez-vous ce bouquin, réedité par Folio, c'est une petite merveille !